Agathe Fautras, Résister en situation autoritaire : le cas des collectifs militants d’après-Gezi à Istanbul (2013-2018), Carnets de Géographes 12|2019. https://doi.org/10.4000/cdg.4916

En partant de l’exemple du mouvement de contestation du « parc de Gezi » en Turquie (2013), cet article vise à étudier les formes de continuation d’un mouvement social après sa répression, et leur maintien dans un environnement politique hostile. En effet, à Istanbul, après avoir été expulsé·e·s des espaces publics qu’ils occupaient, les manifestant·e·s se sont dispersé·e·s dans les quartiers et ont ensuite créé des « collectifs » antihiérarchiques, militant sur des questions urbaines et sociales, prolongeant ainsi certaines revendications et modes organisationnels développés lors du mouvement. Par une entrée géographique, il s’agit ici d’analyser la dimension spatiale des stratégies d’action des militant·e·s dans une situation autoritaire. Les militant·e·s observent un espace public façonné par des discours et des législations issus d’un projet socio-politique dominant à dimension idéologique. Ils cherchent alors d’une part à produire des contre-discours dans l’espace public pour revendiquer un droit à la parole et tenter d’influencer le discours politique, même si leur périmètre d’action demeure limité du fait de la situation autoritaire. D’autre part, ils créent des contre-espaces publics, dans lesquels ils peuvent éviter la répression, mais aussi se retrouver, s’organiser, approfondir leurs réflexions politiques et proposer des relations sociales, économiques et politiques alternatives, tout en maintenant un réseau qui pourra être mobilisé dans un environnement politique plus propice.